En décidant d’inculper pour espionnage Julian Assange, le fondateur de WikiLeaks, la justice américaine démontre une volonté inquiétante de contrôler l’information.
Donald Trump ne s’en cache pas : il déteste les médias. Il les vilipende sur les réseaux sociaux, les désigne à la vindicte de ses partisans dans les meetings électoraux, les qualifie régulièrement d’« ennemis du peuple ».
C’est, cependant, une attaque d’une tout autre nature que le président des Etats-Unis vient de livrer contre la liberté de la presse. Jeudi 23 mai, le département fédéral de la justice a annoncé l’inculpation pour espionnage de Julian Assange, le fondateur de WikiLeaks, pour avoir obtenu et diffusé en 2010 des documents militaires et diplomatiques classés secret. Pour justifier les dix-sept nouvelles charges qui pèsent sur M. Assange, ressortissant australien actuellement détenu en Grande-Bretagne et dont les Etats-Unis demandent l’extradition, la justice américaine invoque une loi contre l’espionnage de 1917, adoptée pendant la première guerre mondiale.
Une grande partie des documents du Pentagone et du département d’Etat obtenus par Julian Assange avaient été transmis à cinq journaux internationaux (The Guardian, The New York Times, Le Monde, Der Spiegel, El Pais), qui avaient travaillé ensemble pour les analyser et masquer, avant publication, l’identification des personnes physiques susceptibles d’être mises en danger. Des informations éclairantes sur le comportement des forces américaines pendant la guerre en Irak, les pertes civiles, le traitement des détenus et la diplomatie américaine avaient ainsi pu être révélées. Un militaire américain, Bradley Manning (devenu depuis Chelsea Manning à la suite de son changement de sexe), avait été condamné à 35 ans de prison en 2013 pour avoir transmis ces documents à WikiLeaks ; le président Obama avait commué la peine en 2017, mais Chelsea Manning est, depuis, retournée en prison…