Omniprésents, les arbres recouvrent 70 % du territoire suédois. Mais il s’agit en réalité de plantations régulées en fonction des besoins de l’industrie. Au pays des trolls et des grands espaces naturels, la forêt primitive ne représente plus que 10 % du total.
En voiture, sur les routes suédoises, il est inévitable d’avoir l’impression que la forêt est partout, avec son moutonnement sombre qui s’étend jusqu’à l’horizon, son armée de troncs qui défile sur les bas-côtés. Elle occupe 70 % du territoire national – un record en Europe, partagé avec la Finlande – et s’immisce jusqu’au cœur des villes. L’Allemansrätt, le libre accès à la nature, est un droit inscrit dans la Constitution qui permet à chacun de la parcourir, d’y cueillir des baies et des champignons. Comme beaucoup de ses concitoyens, le biologiste Sebastian Kirppu a donc pris l’habitude de s’arrêter sur un parking, un peu au hasard, pour s’enfoncer sous les frondaisons. Sauf que le plus souvent il se retrouve alors dans un «champ de poireaux» plutôt que dans une vraie forêt: «Premier indice: il n’y a pas d’arbres morts, remarque-t-il aussitôt. Regardez ensuite ces troncs alignés… Ce sont toujours les mêmes résineux, avec le même gabarit. Quand vous touchez leur écorce, fine comme du papier, vous pouvez en déduire qu’ils ont entre 50 et 60 ans… Ils ont cependant la même taille que les arbres des forêts naturelles, multiséculaires. C’est parce qu’ils ont été plantés sur des marais asséchés ou d’anciennes prairies. Ils poussent très vite et leur bois n’est pas de bonne qualité: ils finiront dans une usine de pâte à papier, pas chez le menuisier.»…