Selon une étude BearingPoint, les budgets consentis par les Français pour leurs abonnements numériques aux médias ont grimpé de 22 % depuis deux ans dans un contexte inflationniste. Plusieurs indicateurs restent globalement positifs et la presse tire son épingle du jeu, mais les tensions s’accumulent, notamment pour le streaming payant.
Même si elle ralentit depuis quelques mois, l’inflation continue à se faire sentir sur l’économie des abonnements numériques. L’étude annuelle du cabinet BearingPoint montre que le budget moyen des Français pour souscrire à des services de vidéo à la demande, musique, presse, jeux vidéo ou autres médias atteint un nouveau sommet en 2024. Même si les tensions s’accumulent, plusieurs indicateurs restent globalement positifs.
En France, chaque foyer détient en moyenne 3,2 abonnements numériques en 2024, un chiffre stable sur un an. Mais les nombreuses hausses tarifaires, combinées aux restrictions au partage de comptes (notamment sur Netflix), se répercutent sur le niveau de dépense moyenne qui progresse à 45 euros par mois (+7 % sur un an, +22 % sur deux ans). Comme par le passé, les jeunes (18-24 ans) restent les plus gros consommateurs d’offres culturelles en ligne, avec 4,5 abonnements en moyenne et un panier de près de 63 euros par mois.
Panier moyen à 45 euros
Nicolas Reffait, associé chargé du secteur médias chez BearingPoint, pointe la « forte résilience » des abonnements numériques après deux ans où l’inflation a grimpé comme jamais depuis les années 1980. Selon lui, ces offres sont « bien ancrées dans les usages et le budget loisirs des ménages » car « la valeur qu’apportent ces abonnements aux loisirs du foyer excède leur coût, ce qui semble en faire une ‘valeur refuge’ en temps de crise ».
A remarquer aussi : les Français continuent de dépenser plus que le montant qu’ils souhaiteraient rationnellement dépenser (27 euros en moyenne par mois), « signe qu’ils considèrent ces abonnements culturels payants indispensables », indique Marion Haumesser, manager dans l’équipe médias de BearingPoint. Toutefois, leur capacité à accepter des hausses de prix a ses limites. Parmi les 2.345 personnes sondées par OpinionWay (contrôlé par le Groupe Les Echos-Le Parisien), plus d’un répondant sur deux serait tenté de se désabonner en cas d’augmentation tarifaire de 10 % !
La presse marque des points
La presse fait cependant figure d’exception : 58 % des abonnés à la presse quotidienne nationale, à la PQR ou à des magazines se disent prêts à accepter une hausse tarifaire de 10 % sans contrepartie. La presse tire d’ailleurs son épingle du jeu dans le « mix » global des abonnements. Pour la première fois depuis la création de cette étude , le taux d’abonnement à la catégorie « presse en ligne » progresse à 16 % (contre 14 % auparavant). L’autre catégorie en progression est celle des jeux vidéo, à 15 % contre 13 %.
En revanche, même si les services d’abonnement de vidéo à la demande (SVoD) restent le type d’abonnement le plus plébiscité (hormis l’accès à la télévision via les box des opérateurs télécoms), leur taux de pénétration, à 63 %, ne grimpe pas. Netflix, qui a en grande partie contribué à façonner cette économie de l’abonnement, reste l’offre la plus répandue car 59 % des Français disent y souscrire. Mais ce taux est en recul pour la première fois. Selon l’étude, cela pourrait s’expliquer aussi par une baisse de la satisfaction des abonnés et par la perception d’un positionnement tarifaire relativement un peu moins bon marché.
Lutte contre le partage des comptes
De fait, le parc d’abonnés de Netflix était toujours en croissance au premier trimestre, et la France ne fait pas exception. La firme de Los Gatos avait prévenu en avril que sa lutte contre le partage des comptes pouvait entraîner une baisse mécanique de l’engagement…
En dehors de Netflix, le podium des marques est complété par Amazon Prime Video (48 % des répondants y sont abonnés) et Disney+ (26 %), alors que Canal+ les talonne avec 25 %. Les Français apprécient de plus en plus les offres package (Canal+, Amazon Prime Channels…). Par exemple, avec son offre à bas prix pour les moins de 26 ans, la filiale de Vivendi a mené une opération réussie en embarquant 500.000 abonnés.
Tolérance à la publicité
En revanche, les abonnés sont moins enclins à s’abonner aux offres de streaming avec publicité, pourtant moins chères : moins de 50 %, dans quasiment toutes les offres de vidéo à la demande et de musique (Spotify, Deezer…) songent à cette option. Mais chez les jeunes, la tolérance à avoir des spots publicitaires est plus forte (70 %).
Au final, la compétition est de plus en plus aiguë, surtout dans la vidéo à la demande. Après l’arrivée de Paramount+ fin 2022, Max (Warner Bros. Discovery) débarque en France dans quelques jours, et les acteurs du payant devront aussi composer avec le renouveau des plateformes gratuites (TF1+ et M6+). « Les consommateurs deviennent de plus en plus exigeants, que ce soit en matière de contenus, de prix, d’expérience utilisateur mais aussi d’enjeux écologiques », conclut Marion Haumesser. Parmi les plus jeunes (18-24 ans), 60 % sont en effet préoccupés par l’empreinte carbone de leur abonnement.