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Si vous utilisez des Pantones sur Photoshop, il va falloir passer à la caisse

Dans le monde du graphisme, la bibliothèque de couleurs Pantone est un standard incontournable. Ses palettes sont utilisées au quotidien par des centaines de milliers de designers, souvent par l’intermédiaire de la suite créative d’Adobe (Photoshop, Illustrator, InDesign…). Et ces derniers ont eu une surprise des plus détestables ces dernières semaines : il faut désormais s’acquitter d’un supplément assez onéreux pour utiliser ces couleurs en toute légalité !

Ce changement avait été discrètement glissé dans une annonce sur le blog d’Adobe en novembre dernier. De nombreux utilisateurs étaient passés à côté et n’en avaient pas conscience. Ils ont donc été pris au dépourvu en constatant que dans tous leurs projets Adobe, les couleurs Pantone avaient été systématiquement remplacées par un carré noir.

Comment continuer à utiliser les couleurs Pantone avec la suite Adobe ?

Pour avoir l’immense privilège d’utiliser ces couleurs, il faut télécharger la nouvelle extension Pantone Connect et s’acquitter d’un abonnement de 15 € par mois, ou 83,99 € à l’année — deux fois le prix initialement annoncé. Une dépense supplémentaire qui a beaucoup de mal à passer chez les professionnels de la création, ces derniers versant déjà une somme considérable à Adobe tous les mois pour utiliser la suite logicielle.

À noter que d’après la FAQ d’Adobe, la situation ne semble concerner que les versions sorties avant août 2022 (soit jusqu’à Photoshop 23.4, Illustrator 26.4 et InDesign 17.3). Techniquement, il est donc possible de conserver l’accès à ces bibliothèques à condition d’utiliser une version plus ancienne. Mais cela ne conviendra pas aux professionnels du graphisme, et dans tous les cas, ces vieilles éditions ne seront pas disponibles indéfiniment.

L’entreprise, de son côté, se défausse de toute responsabilité. « Pantone a demandé ce retrait, parce qu’ils souhaitent facturer les clients directement », a tweeté Scott Belsky, chef de produit chez Adobe. Les porte-parole de l’entreprise ont aussi indiqué à Ars Technica qu’Adobe explore en ce moment diverses manières de limiter l’impact de cette situation sur ses clients.

L’autre protagoniste, en revanche, a une version assez différente. Adobe n’aurait pas mis à jour les bibliothèques Pantone dans ses applications pendant de longues années, ce qui aurait conduit à la fin de l’accord commercial qui unissait les deux entreprises jusqu’à récemment.

Pourquoi les bibliothèques Pantone sont-elles si importantes ?

La fondation Pantone ne possède pas ces couleurs à proprement parler ; vous avez tout à fait le droit de les utiliser dans une de vos œuvres sans risquer un procès. Ce que propose Pantone, c’est en fait un service de standardisation.

Ce catalogue, inventé en 1963, a permis de résoudre un problème aussi vieux que l’imprimerie elle-même : la reproduction et la correspondance des couleurs. La bibliothèque Pantone est avant tout un système de référence qui permet de s’assurer qu’une couleur sera standardisée exactement de la même façon, quel que soit le support (une carte postale en carton, une bande dessinée en papier, un t-shirt en tissu…).

C’est d’autant plus important aujourd’hui, avec la démocratisation du graphisme par ordinateur. En informatique et plus largement sur Internet, on définit une couleur grâce à trois valeurs numériques qui correspondent au rouge, au vert et au bleu (RGB, pour Red, Green, Blue).

Mais dans le monde réel, c’est une autre histoire ; les imprimeurs travaillent avec un standard différent, le CMYK. Ici, les couleurs sont dérivées du cyan, du magenta, du jaune et du noir. De plus, la norme RGB est par définition additive ; on cumule les valeurs des différentes sous-teintes pour arriver à la couleur finale. Dans le cas du CYMK, c’est tout l’inverse, puisqu’il s’agit d’un processus soustractif.

Les bibliothèques Pantone permettent de faire le lien entre les différents médias ; il suffit de fournir le code correspondant à la couleur souhaitée (comme 18-0108 TCX, qui correspond à cette couleur verte) pour s’assurer qu’elle sera correctement reproduite à la fin de la chaîne, quel que soit le processus utilisé.

C’est donc un standard très important dans ce milieu, et de nombreux professionnels n’ont tout simplement aucun moyen de s’en passer. Pas étonnant que ces derniers aient vécu la décision de Pantone comme une prise d’otage.

 

Lire : Journal du Geek du 4 novembre

 

Jean-Philippe Behr

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