On pourrait imaginer qu’une forme de soutien soit accordé aux commerces de proximité au nom de la fonction sociale qu’ils remplissent. Car le lien social n’est pas réductible aux relations commerciales mais ces dernières en constituent une des modalités de sa construction.
Le confinement, les débats autour de la réouverture des commerces (et des librairies) et de la concurrence du commerce en ligne auront peut-être eu pour vertu de lever une ambiguïté entre économie et activité commerciale. Par-delà, cela pourrait conduire à redéfinir le statut du commerce physique.
Il ne fait aucun doute que libraires et commerçants sont des agents économiques. Par ce qu’ils vendent à leurs clients, ils génèrent un chiffre d’affaire, font vivre des fournisseurs et des salariés et paient des impôts. Mais, pour des raisons idéologiques, dans nos sociétés, la dimension économique est devenue première et s’est autonomisée du reste de l’existence. Cela a conduit à créer des zones commerciales périphériques dédiées spécifiquement à cette activité. Les parkings imposants permettaient d’accueillir la masse des consommateurs venant des campagnes alentour ou du centre ville. L’augmentation des loyers des boutiques installées au cœur des villes a alimenté ce processus. Il y a une vingtaine d’années, Roger Mossovic, libraire bien connu à Nancy notamment parce qu’il a pris part à la création du « Livre sur la Place », racontait comment la location de l’espace que fut son ancienne Librairie des arts lui rapportait autant que quand il y travaillait…