Edouard Philippe a reçu mercredi des associations et représentants des journalistes afin d’échanger sur « les enjeux pour le secteur » mais aussi pour garantir que l’exécutif ne toucherait pas à la loi de 1881 et n’instaurerait pas de Conseil de l’ordre, ont indiqué Matignon et une des participantes. En invitant des représentants de l’ensemble des acteurs de la profession, journalistes et éditeurs, le Premier ministre a souhaité « rappeler l’engagement du gouvernement à défendre la liberté de la presse et le rôle
essentiel que jouent la presse et les médias dans la démocratie », a indiqué Matignon. Le Premier ministre a dit mercredi qu’il n’était « pas question de modifier la loi de 1881 », ni de « créer un Conseil de l’ordre des journalistes », lors de cette rencontre à laquelle participait la SDJ de l’AFP, le syndicat SNJ ou encore Reporters sans frontières. Avec à ses côtés le ministre de la Culture Franck Riester, Edouard Philippe a insisté sur le fait que le gouvernement ne se mêlerait pas de la création d’un conseil de déontologie, en cours d’élaboration, et sur lequel la profession reste divisée. Sur les violences policières contre les journalistes, Edouard Philippe a souligné qu’il n’y avait pas eu de « consignes » pour « empêcher (les journalistes) de travailler ». Evoquant une situation « très tendue » sur le terrain, le Premier ministre a affirmé qu’il y avait eu « des sanctions contre des gens qui avaient dépassé les limites », sans préciser lesquelles. Cette rencontre s’inscrivait dans un contexte d’incertitudes et de tensions entre la profession et l’exécutif, après de récentes déclarations gouvernementales.
En juin, la ministre de la Justice Nicole Belloubet avait affirmé vouloir sortir l’injure raciale de la loi de 1881 sur la liberté de la presse, suscitant des mises en garde de plusieurs avocats spécialisés en droit de la presse. Fondamentale pour les journalistes, la loi du 29 juillet 1881 instaure un régime dérogatoire leur permettant de protéger leurs sources et de livrer des informations d’intérêt général en prenant le risque parfois de la diffamation publique. Cette loi a notamment été invoquée par la journaliste du Monde Ariane Chemin, convoquée en mai par la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) dans le cadre d’une enquête pour « révélation de l’identité d’un membre des forces spéciales ». Cette audition, ainsi que celle de sept autres journalistes pour des travaux sur l’utilisation d’armes françaises au Yémen, avait soulevé une vague de protestations de la profession. En juin encore, le secrétaire d’Etat au Numérique Cédric O avait suscité une levée de boucliers en se prononçant pour un « conseil de l’ordre » des journalistes afin de lutter contre les fausses nouvelles et la désinformation dans leurs rangs, tout en prévenant qu’à défaut, ce serait à l’Etat lui-même d’intervenir. M. O avait ensuite invoqué « des paroles malheureuses ».