Les deux éditeurs de presse spécialisés dans la vie des idées vont fusionner d’ici l’été. L’opération doit permettre à ces groupes indépendants de mutualiser leurs investissements pour se développer notamment sur le numérique.
Ce n’est pas une fusion qui va faire trembler les marchés, mais tout de même une alliance importante dans l’écosystème fragile de la presse indépendante. Le groupe Philo Editions, éditeur du mensuel « Philosophie magazine » en France, et la société éditrice du mensuel « Sciences Humaines », Sciences Humaines Communication, annoncent ce jeudi leur projet de fusion.
Soumis à l’approbation des instances représentatives des salariés et des actionnaires, ce rapprochement entre les deux structures devrait être effectif en juillet prochain. A l’issue de cette opération en titres, l’éditeur et co-fondateur de « Philosophie Magazine », Fabrice Gerschel, restera majoritaire de Philo Editions, où le fondateur de « Sciences Humaines », Jean-François Dortier, entrera comme actionnaire minoritaire.
Au total, le nouvel ensemble devrait afficher un chiffre d’affaires annuel de quelque 10 millions d’euros et rassembler environ 55 salariés installés à Paris, siège de « Philosophie magazine », Berlin, où le titre a sa filiale allemande, et Auxerre, siège historique de « Sciences Humaines ». Les rédactions resteront séparées. Créé en 2006, « Philosophie magazine » affiche une diffusion payée de 34 000 exemplaires en moyenne en 2022, contre 30.000 environ pour « Sciences Humaines », fondé en 1990.
Hausse de pagination
Née du désir de Jean-François Dortier de préparer sa succession, cette alliance entre deux groupes indépendants et complémentaires, réputés dans des domaines parallèles de la vie des idées, doit permettre de réaliser des synergies, avec des mutualisations des fonctions support, du développement numérique, de la publicité et des activités de diversification.
Sur le numérique, « Philosophie Magazine », qui a renforcé ses équipe web en 2020 et vu son nombre d’abonnés en ligne tripler depuis – à 15.000 aujourd’hui – peut faire bénéficier son nouveau cousin de son expérience. Le site de « Sciences Humaines » va ainsi être refondu.
A contre-courant de beaucoup d’acteurs du secteur, le groupe compte aussi investir sur le papier. Le mensuel « Sciences Humaines » va ainsi être repensé à l’été, avec une pagination plus longue. « C’est un très beau magazine qui mérite plus de pages et d’images », insiste Fabrice Gerschel.
Synergies
Enfin, les équipes de « Sciences Humaines » apporteront leur expertise en sociologie, psychologie ou sociologie des organisations à l’activité du groupe pour les entreprises, « Philonomist ». Avec un média en ligne, des événements et des formations, celle-ci rapporte à peu près 20 % des revenus du groupe. Les deux sociétés sont aussi actives dans l’édition de livres.
Frappé par la hausse des coûts du papier, Philo Editions n’est pas rentable, mais le serait sans les investissements alloués à la transition digitale, précise Fabrice Gerschel. Ce dernier espère un retour dans le vert à court terme, le temps que cette alliance porte ses fruits. « Idéalement en 2023, mais le temps de mettre en oeuvre les synergies et comme nous continuons à investir, ce sera peut-être un peu plus loin, » avance-t-il prudemment.
Il souligne au passage l’absence de dispositif d’aide spécifique à la presse indépendante, alors que celle-ci doit absorber, avec ses moyens modestes, la transition digitale et l’inflation des matières premières et de l’énergie.