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Les librairies redémarrent doucement via le Click & Collect

L’aval du ministère de l’Intérieur permet désormais de commander puis de retirer des livres auprès des librairies, sans verbalisation. Mais les libraires s’inquiètent des conditions sanitaires.

 

La réouverture des librairies est un feuilleton à épisodes. Mais une fenêtre vient de s’entre-ouvrir. Proposée par la rue de Valois, la décision d’autoriser les librairies à vendre des livres par guichet, via un système de Click & Collect, a reçu l’aval de Bercy puis de la place Beauvau.

 

Comme l’a annoncé le Ministre de la Culture, Franck Riester, sur France Inter, la mesure permettra de commander son livre par téléphone ou Internet à la librairie de son choix et de le retirer à un guichet, en cochant la case « déplacement pour effectuer des achats de première nécessité. ». Soulignant au passage : « Les librairies sont le poumon économique de la chaîne du livre ».

Suppression de toute verbalisation

 

« La possibilité de le faire était mentionnée à l’article 8 du décret du 23 mars, qui fixait les mesures d’urgence imposées par l’épidémie », indique-t-on au cabinet du ministère. « Mais c’était compliqué, les clients risquaient d’être verbalisés et peu d’acteurs l’ont saisie, à l’exception de quelques grandes librairies. Là, le ministère de l’Intérieur a demandé aux agents de police de donner leur aval à ces achats, qui s’ajoutent à ceux de première nécessité. Les Français étaient très demandeurs de la réouverture des librairies… »

 

La libéralisation des achats dans les librairies apparaît d’autant plus salutaire que ces dernières figurent parmi les commerces les plus durement touchés par la décision de confinement.

Perte de 31 % pour le marché du livre

 

Selon les chiffres communiqués par l’institut GfK et repris par « ActuaLitté », le marché du livre a perdu près de 31 % en valeur sur le mois de mars. Et du côté des points de vente, la catastrophe est patente : les librairies de niveau 1 (soit les 700 à 1.300 librairies les plus importantes) accusent un recul de 52,4 % des ventes, tandis que les enseignes (grandes surfaces culturelles) perdent 48,93 %. Les grandes surfaces alimentaires accusent une chute de 49,70 % et le secteur librairie niveau 2, auquel est associé Internet, subi une baisse de 45,84 %, toujours selon GfK.

 

Pourtant, Bruno Le Maire, Ministre de l’Economie, avait tendu la main aux acteurs du secteur en confiant, le 19 mars, sur France Inter : « Je ne vois pas pourquoi ce serait uniquement Amazon qui pourrait récupérer le marché, au risque de fragiliser les librairies », soulignant qu’à ses yeux « les librairies sont effectivement un commerce de première nécessité. »

 

Mais le Syndicat de la Librairie Française (SLF) avait mal accueilli son annonce, en publiant un communiqué insistant sur la nécessité de respecter, en priorité, les conditions sanitaires et réclamant en creux, qu’Amazon cesse son activité de libraire en ligne : « Les conditions strictes imposées par le gouvernement, dont la limitation maximale des contacts, s’imposent également aux opérateurs qui continuent, comme si de rien n’était, de vendre et de livrer des produits définis comme ‘non indispensables’ dans la période actuelle », indiquait-il. Le 14 avril, le tribunal de Nanterre a accédé, de manière indirecte, à sa demande, en sommant le géant de l’e-commerce de limiter pour l’instant ses livraisons aux seuls produits de première nécessité.

Créer un Fonds de compensation

 

« Remettre Amazon au pas est une mesure d’équité en termes de concurrence », estime Guillaume Husson, délégué général du SLF. « Mais il n’est pas certain que cette facilitation du Click & Collect nous apporte énormément de clients… Et puis comment les gérants vont-ils s’approvisionner en gants et en masques ? Il faut réfléchir à tous ces éléments. »

 

En réalité, les 3.200 librairies indépendantes attendent surtout une aide financière de l’Etat et certaines redoutent que la décision de la rue de Valois n’entraîne sa diminution.

 

Une enveloppe d’urgence de 20 millions d’euros a été déjà débloquée pour le secteur de la Culture, dont 5 millions pour le Livre. Par ailleurs, le Fonds de Solidarité National s’est engagé à verser une aide comprise entre 1.500 et 2.000 euros à chaque librairie et s’apprête, pour le second niveau d’aide financé par les régions, à porter cette somme jusqu’à 5.000 euros. « Mais ce que souhaite le Syndicat, c’est la création d’un Fonds de compensation prenant en charge les pertes d’exploitation estimées à 16 % du chiffre d’affaires global des librairies, soit entre 20 et 25 millions d’euros, en nous appuyant, pour comparer, sur la période mi-mars-mi-mai 2019 », reprend Guillaume Husson. Le feuilleton de l’ouverture des librairies est donc loin d’être épuisé.

 

Lire : Les Echos du 16 avril

 

Jean-Philippe Behr

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