Les enquêtes du média fondé en 2016 par des anciens de « Libération » seront bientôt adaptées sous forme de podcasts et de documentaires.
L’incertitude demeure, mais l’optimisme gagne du terrain dans la rédaction du site d’information Les Jours. Trois ans après sa création par des anciens journalistes de Libération lors du rachat du quotidien par Patrick Drahi, le média payant devrait bientôt cesser de perdre de l’argent. Il compte aujourd’hui 11 000 abonnés, « et il nous en faut entre 12 000 et 13 000 pour atteindre l’équilibre », précise Isabelle Roberts, cofondatrice et présidente des Jours.
Le site affirme avoir divisé ses pertes par trois en un an. Mais la rédaction de 12 salariés « ne peut pas se contenter de vivoter », explique Mme Roberts. Pour « passer à une phase de développement », Les Jours lancent donc une nouvelle levée de fonds à l’occasion de leur troisième anniversaire, sans annoncer d’objectif. L’an dernier, le média avait levé 348 000 euros, après 480 000 euros en 2017. Les cofondateurs, dont quatre ont dernièrement quitté le média, détiennent à ce jour 74 % du capital, le reste étant réparti entre les abonnés actionnaires (8 %) et les investisseurs privés, parmi lesquels Xavier Niel, Matthieu Pigasse (actionnaires du Monde à titre individuel) et Renaud Le Van Kim, cofondateur du média en ligne Brut.
Diversification
Les Jours ont d’autant plus besoin de ce soutien financier qu’ils naviguent dans des eaux tourmentées. Au cours de l’année écoulée, trois médias français Vraiment, Ebdo et Explicite ont fermé, faute d’abonnés, peu après leur lancement. Sans publicité et entièrement payant, le site Les Jours doit donc convaincre des lecteurs de s’abonner pour survivre. « Les gens sont de plus en plus prêts à payer pour de la musique, des séries, et donc aussi pour de la presse de qualité », veut croire Mme Roberts. Mais ils ne peuvent parfois pas cumuler plusieurs abonnements et doivent donc faire des choix », reconnaît-elle.
Pour ne pas dépendre uniquement des abonnements, le média a très tôt commencé à se diversifier. Sa stratégie : décliner sur différents supports ses enquêtes. Sept d’entre elles ont ainsi donné lieu à des livres, publiés aux éditions du Seuil, Marabout ou Fayard. Vendus à 80 000 exemplaires, ils ont permis de « toucher un public plus large, qui n’aime pas forcément lire sur Internet », relève Mme Roberts, en rappelant que la moitié des abonnés a moins de 35 ans. Un partenariat a aussi été noué avec Brut, qui diffuse sur les réseaux sociaux des vidéos tirées d’articles des Jours.
Cette diversification va prochainement s’étendre à de nouveaux secteurs. Celui du son, avec l’adaptation d’enquêtes par une plate-forme payante de podcasts, mais aussi de l’audiovisuel : « Plusieurs projets de documentaires sont en cours de discussion avec des producteurs et aussi avec Netflix », indique Mme Roberts.