Dans un contexte de hausse des prix de l’énergie et de fortes pressions sur l’approvisionnement en matières premières, les livres ne pouvaient pas échapper bien longtemps à la menace de l’inflation. Si peu d’éditeurs reconnaissent des hausses de prix, ces dernières semblent inévitables.
L’édition s’y préparait psychologiquement depuis plusieurs mois : après les craintes liées à une pénurie de papier, qui planent depuis un an déjà, voici venir la hausse des coûts des matières premières, qui n’épargne pas les filières de la papeterie et de l’impression.
En amont, Copacel, le syndicat professionnel de l’industrie des papiers, cartons et celluloses, avertissait dès le mois de juillet dernier de « hausses des prix de vente […] variables selon les segments de marché », selon l’expression de l’organisation. À la multiplication des coûts des matières premières s’ajoutaient celle des frais de transport, de l’encre, ou encore des difficultés sur le plan de la main d’œuvre.
N’en jetez plus ! Aux Rencontres Nationales de la Librairie, en juillet dernier, une personnalité bien informée du Syndicat national de l’édition soufflait que la hausse des prix s’était d’ores et déjà répercutée sur les prix d’ouvrages de certains éditeurs.
Pour l’instant, les éditeurs de mangas et de bandes dessinées semblaient les seuls à jouer la transparence : dès décembre 2021, Panini communiquait sur des changements de prix de mangas, quelques jours avant son concurrent Pika et plusieurs mois avant Kana. Le groupe Delcourt ouvrait 2022 avec des hausses de prix également, en raison de « la forte augmentation des coûts de production, en lien avec la crise des matières premières, papier et carton ». Le 1er juillet dernier, Urban Comics a fait de même, relevant de 1 € les prix de certaines publications.
Soulignons que ces hausses des tarifs des matières premières touchent plusieurs pays d’Europe et du monde : au Royaume-Uni, la Première ministre, tout juste nommée, a reçu des doléances sur le sujet. Au Canada, l’imprimeur Marquis prévient tous ses clients de hausses à venir en octobre, pour répercuter une augmentation de 8 % des coûts du papier.
Chère rentrée
En pleine rentrée littéraire, Philippe Robinet, directeur général de Calmann Lévy (groupe Hachette) a révélé sur Europe 1 une hausse prochaine des ouvrages de littérature générale publiés par la maison, fixée à 1 € supplémentaire.
Il reste complexe de comparer les prix des livres d’une année à l’autre : si un éditeurs tendra à toujours rester dans une certaine fourchette pour les titres d’une même collection ou présentant un nombre de pages proche, le statut d’un auteur, le volume de ventes espéré ou encore certains postes de dépense, comme la communication, peuvent influer sur le prix final d’un ouvrage.
L’arithmétique de l’édition repose sur un système d’équilibres : un titre dont les ventes sont prometteuses « garantira » l’investissement, en parallèle, dans des œuvres moins « certaines » sur un plan commercial, le succès de l’un compensant la parution plus discrète de l’autre. Avec, parfois, des surprises et des retournements de situation, à la faveur d’un prix littéraire, par exemple. Le cas d’Hervé Le Tellier, avec L’anomalie, fait partie de ces… anomalies, et fait les beaux jours de Gallimard alors que l’auteur n’était pas présent en tête de gondole avant cette parution…