Comment s’envisage le métier de fabricant d’histoire, indépendamment du fonctionnement même de la création desdites histoires ? Éditeur, qu’est-ce que c’est finalement ? Avec le concours de David Meulemans, directeur éditorial des Forges de Vulcain, ActuaLitté propose une série d’analyse sur les mythes et légendes autour du métier.
Je viens de montrer, à mon insu, ce qui peut-être distingue un mythe d’un simple cliché. Un cliché, c’est une image fausse, contrefaite, et pourtant diffuse. Un mythe a toujours une parcelle de vérité, un mythe est une fable, c’est une histoire fausse, mais qui contient une injonction finale. Croire que l’éditeur n’est qu’une instance de choix, c’est une manière de rappeler qu’il ne doit pas renoncer à être cette instance.
Des petits ruisseaux aux grandes rivières
En ce sens, le mythe ne recèle pas nécessairement une vérité. Ou plutôt, il recèle peut-être la vérité d’un tel ou d’un tel. Ses croyances, ce qu’il veut croire, car cela l’aide à mieux vivre. Le bénéfice de l’analyse des mythes est donc de nous amener chacune et chacun à voir que la plupart des choses que nous croyons, nous ne les croyons que parce qu’elles nous aident, à court terme, à vivre. Mais comme souvent, ces croyances sont fantaisistes, elles nous éloignent du réel et, à terme, nous rendent malheureux.
Par exemple, si l’on pense tant que ce qui définit l’éditeur, c’est cette faculté de choisir, c’est une manière pour les éditeurs de dire : eh bien, cela, on ne me le retirera pas. Quand tout m’aura été pris, il me restera cela, je suis celui qui choisit. En ce sens, si les éditeurs souffrent de n’être perçus que comme ceux qui choisissent, c’est parce qu’ils se définissent comme, d’abord, ceux qui choisissent. C’est la matrice des mythes…