Pascal Lenoir, Directeur de la Production aux Éditions Gallimard, Président de la Commission Environnement et Fabrication au SNE (Syndicat National de l’Edition) et Président de la CCFI
Suite à la sortie de la 3ème édition de l’étude sur les achats de papier des éditeurs de livre en France, réalisée par le Syndicat National de l’Edition (SNE), Pascal Lenoir, Directeur de la Production aux Éditions Gallimard, Président de la Commission Environnement et Fabrication au SNE et Président de la CCFI, revient pour PEFC France sur les enjeux économiques, sociétaux et environnementaux auxquels fait face le secteur de l’impression.
Pouvez-vous nous présenter la Commission Environnement et Fabrication au sein du SNE dont vous êtes le Président et ses principales missions ?
Pascal Lenoir
Créée il y a 9 ans au sein du SNE, la Commission Environnement et Fabrication regroupe des éditeurs et distributeurs de toutes tailles sur le territoire français pour échanger sur les problématiques de production et de l’environnement dans le monde de l’édition. Faire avancer les débats et informer les adhérents du SNE sur les nouvelles réglementations et initiatives émergentes sont les missions de cette Commission.
Avec celle-ci, le SNE est le seul syndicat qui aborde ces sujets essentiels pour la filière. Conscient de l’empreinte environnementale de ses activités, le secteur de l’édition s’est, en effet, très tôt interrogé sur ses pratiques durables et mène ainsi, depuis les années 2000, des réflexions sur les bonnes mesures à adopter en termes d’utilisation papier. L’utilisation du papier certifié ou recyclé est une des solutions à laquelle le secteur a recours, comme le révèle l’étude sur les pratiques d’achat de papier chez les éditeurs pour la fabrication de livres dont 95% du papier acheté en 2018 était certifié ou recyclé. Le secteur applique aussi depuis de nombreuses années les principes de l’économie circulaire pour gérer ses invendus : après avoir été triés, ceux-ci sont soit réintégrés dans les stocks pour être revendus, soit vendus à des soldeurs professionnels, soit mis au pilon s’ils sont trop abîmés ou obsolètes pour être recyclés.
Comment pourriez-vous expliquer la différence et/ou la complémentarité entre le papier certifié issu de fibres vierges et le papier certifié issu de fibres recyclées ?
Pascal Lenoir
La différence majeure entre les deux types de papiers est leur qualité ; le papier certifié issu de fibres vierges étant plus résistant dans la durée que le papier certifié issu de fibres recyclées. Grâce à cette distinction, ces papiers sont complémentaires : le papier certifié issus de fibres recyclées est à privilégier pour des utilisations court-termistes, lorsque l’information qu’il recèle est éphémère comme la publicité. Alors que le papier certifié issu de fibres vierges est recommandé pour des produits qui ont vocation à durer dans le temps, telle que la littérature.
L’autre différence qui sépare ces deux types de papier est leur traçabilité. La certification du papier, à l’instar de la certification PEFC, garantit aux industriels, aux acheteurs, et aux lecteurs que la fibre de papier utilisée est issue de forêts gérées durablement ou de sources responsables. Consommer du papier certifié issu de fibres vierges est la clé pour encourager une chaîne de production qui respecte et veille à la préservation de la forêt. Le papier certifié issu de fibres recyclées quant à lui ne permet pas de garantie à cet égard même si son utilisation apporte un intérêt en termes de diminution de la pression sur les forêts. Parce que la sauvegarde de la forêt est en jeu, tout papier devrait en ce sens être certifié.
Le livre présente de nombreux points communs avec la forêt. Pouvez-vous nous décrire ce lien si particulier et les caractéristiques de cet objet récemment redevenu tendance ?
Pascal Lenoir
Le livre n’est pas seulement un produit de la forêt, il est aussi un objet à son image. Tous deux s’inscrivent d’abord sur le temps long. Ils traversent ensemble les années pour transmettre aux générations futures un patrimoine pour l’un, culturel – le livre étant son support privilégié – et pour l’autre, environnemental – la forêt recélant une biodiversité unique et étant un puits de carbone essentiel. La durée de vie d’un livre n’a ainsi pas vocation à être courte, bien au contraire. Le choix du papier certifié PEFC y contribue, ainsi que la manière dont est utilisé l’objet : n’ayant jamais vocation à devenir un déchet, il peut être donné, prêté, revendu, comme en témoigne le marché de la seconde main qui n’a jamais été aussi à la mode, et tant mieux !
Le livre, comme la forêt, est aussi au cœur d’enjeux économiques et sociétaux. D’un point de vue économique, la consommation papier a été réduite de 50% en 10 ans, mais l’édition rattrape son retard car les Français et Françaises se remettent à lire. La lecture papier est devenue un véritable divertissement à part entière qui a été renforcé avec le confinement, les personnes commençant à se lasser des écrans permanents.
La lecture sur écran présente notamment ses limites lorsque l’on apprend à lire : elle perturbe l’œil, peut engendrer des problèmes physiologiques, et le taux de mémorisation est plus faible. C’est en cela que le livre est un objet social : il rend l’apprentissage de la lecture plus accessible et performant.
Ses différentes fonctions économiques et sociales, ainsi que sa forte conscience environnementale évoquée précédemment, positionne le livre comme un objet très précieux qu’il est important de sauver. Sa préservation est intimement liée à celle de la forêt. C’est pour cela que le soutien à la gestion durable de la forêt et le recours à la certification, comme la certification PEFC, est une priorité pour la filière de l’édition.