COPACEL – L’industrie papetière française a tenu sa conférence de presse économique annuelle le 21 mars 2018. A cette occasion, ont été présentés le bilan économique 2018 ainsi que les perspectives pour 2019.
Une croissance en valeur de la production papetière française en 2018 (+ 4,5 %), mais des situations contrastées selon les marchés
Le chiffre d’affaires de l’industrie papetière française a cru de 4,5 % en 2018
Avec 7,9 Mt, le volume des papiers et cartons produit en 2018 par l’industrie papetière française est en repli (-2,0 %) par rapport à 2017, année au cours de laquelle la production avait légèrement progressé (+0,5 %). Ce constat général, qui ne rend pas compte de situations contrastées selon les sortes de papiers et cartons, s’accompagne d’une diminution du poids relatif de l’industrie papetière française. En effet, alors que la production française a reculé, celle des autres pays européens est restée quasiment stable en 2018 par rapport à 2017 (-0,2 %). En valeur, cependant, et pour la France, le chiffre d’affaires de l’industrie (papier, carton et pâte marchande) s’est apprécié de 4,5 %, ceci en raison de l’augmentation du prix de vente de la plupart des familles de produits. Les entreprises papetières françaises restent très largement exportatrices (53 % de la production est vendue à l’étranger, chiffre stable par rapport à 2017).
Les variations de la demande et de la production de papiers et cartons ont été différentes selon les marchés
La demande en papiers et cartons destinés à la fabrication d’emballages (caisses en carton, boîtes pliantes, sacs…), en dépit d’un tassement en fin d’année, est demeurée ferme en 2018, ceci grâce à un niveau satisfaisant de l’activité économique générale et à de nouvelles habitudes de consommation induisant une utilisation accrue d’emballages papier/carton (commerce en ligne, consommation nomade, ventes de produits « bio » …). En dépit de cette situation favorable, la production des papiers et cartons d’emballages en France s’est contractée en 2018 (-1,2 %), ceci en raison d’arrêts techniques sur plusieurs sites de papiers pour caisses en carton ondulé (PPO). A cela s’est ajouté l’arrêt sur plusieurs mois d’une usine produisant de l’emballage souple.
Concernant les papiers à usage graphique, même si la demande reste satisfaisante pour certains usages (publicité « boîte aux lettres », livre jeunesse, BD…), d’autres continuent à reculer de manière modérée (papiers bureautiques) ou plus substantielle (papiers de presse). A l’échelle européenne, la production s’ajuste à ce recul de la consommation, ce qui s’est traduit en 2018 par une diminution du tonnage produit en France pour ces papiers (-5,1 % à comparer à -1,5 % en 2017).
Sur des marchés dans l’ensemble matures, la production des papiers d’hygiène voit son volume légèrement augmenter (+0,6 %) par rapport à 2017.
Dans un contexte haussier des coûts de production, les cours des matières premières fibreuses ont été très impactés par les marchés mondiaux
Les coûts des produits chimiques et de l’énergie (+ 31 % en moyenne annuelle pour le gaz, et + 11 % pour l’électricité) ont progressé de manière sensible en 2018, année par ailleurs marquée par des tensions pour l’achat de transport.
Les marchés de la pâte à papier ont été tendus durant une large partie de l’année 2018, en raison d’une demande mondiale soutenue, tirée par la Chine, et d’une offre réduite consécutive à des problèmes techniques dans plusieurs usines. Même avec le tassement de la demande à partir du dernier trimestre et le reflux des cours, les prix de la pâte à papier ont atteint en moyenne annuelle des niveaux historiquement hauts. Le prix de la pâte de résineux (NBSK), en dollars, a ainsi été de 30 % supérieur à la moyenne 2017. Cette situation inédite a fortement pesé sur la rentabilité des entreprises papetières dont la matière première fibreuse est constituée de pâte marchande achetée sur le marché mondial.
Pour ce qui concerne les prix des Papiers et Cartons à Recycler (PCR), l’influence chinoise a également été forte, mais très différente de ce qui a pu être constaté sur le marché de la pâte. Alors que la Chine, par le niveau de sa demande, explique largement le niveau élevé des cours, elle est la cause également, par sa politique, de la diminution de prix de plusieurs sortes de PCR. En effet, ce pays a adopté en 2017 une politique restrictive en matière d’importations de déchets, ce qui a eu pour conséquence de restreindre des débouchés pour les PCR collectés en Europe et en Amérique du Nord. Cette hausse de l’offre en Europe a eu un effet baissier sur les cours, de manière sensible pour les caisses en carton ondulé (38 % en moyenne annuelle 2018 par comparaison à 2017), mais beaucoup plus modérée, voire nulle pour les déchets substituables à de la pâte à papier (rognures blanches).
Des hausses de prix ont été observées pour quasiment toutes les sortes
Les entreprises papetières ont été conduites à augmenter leurs prix en 2018, soit pour répercuter les hausses mentionnées ci-dessus (pâte à papier et énergie principalement) et ainsi tenter de préserver leurs marges, soit pour prendre en compte les conditions d’offre et de demande observées sur leurs marchés. En moyenne annuelle, les prix ont ainsi progressé de l’ordre de 10 % pour la principale catégorie de papiers pour ondulé et de plus de 13 % pour le papier journal.
Les nouvelles habitudes de consommation orienteront la demande en papiers et cartons
Comme la plupart des activités industrielles, l’industrie papetière sera impactée en 2019 par la manière dont évoluera la croissance mondiale et européenne, croissance qui elle-même sera pour partie déterminée par des facteurs internationaux (issue de la guerre commerciale entre les Etats-Unis et la Chine, conséquence du Brexit, ampleur du ralentissement de la demande chinoise).
A ces déterminants s’ajoutent des leviers plus sectoriels. Le premier concerne l’impact sur différents types d’articles (emballages, gobelets…) d’un mouvement constaté dans les pays développés visant à restreindre l’usage des matières plastiques au profit de matériaux alternatifs, ce qui à l’évidence offre des perspectives à la cellulose (qui est une molécule biosourcée, biodégradable et qui entre dans la fabrication de produits recyclables). Le deuxième déterminant est l’impact des technologies numériques, qui continuent à se substituer aux usages de certains papiers graphiques, jusqu’à une « ligne de base » que nul ne peut prédire.
Jean-Philippe Behr
