En 1998, Gallimard publiait le premier tome de la saga imaginée par J. K. Rowling. Si les débuts furent confidentiels, la qualité littéraire du livre et le magnétisme du héros emballèrent la jeunesse qui en fit le succès éditorial de ce début de siècle.
Par une nuit d’hiver à Londres, en 1997, Barry Cunningham reçoit sur sa table une pile de feuilles. Il est encore nouveau dans la petite maison d’édition Bloomsbury qui l’a sollicité pour lancer sa collection jeunesse. Il n’a pas la fatigue de l’éditeur rodé depuis des années à publier les mêmes histoires. Et voilà donc que ce manuscrit atterrit chez lui.
«Je constatais qu’il n’était pas de la première fraîcheur et que beaucoup d’autres personnes l’avaient déjà lu», se souvient-il. Sûrement, le papier est-il corné et sécrète cette odeur de café qui ne tient qu’à lui. Il le lit et la magie opère. «Je ne savais pas à ce moment-là qu’il avait été refusé», selon les versions, par 10, 11 ou 12 éditeurs, «mais j’ai tout de suite pensé que l’histoire d’amitié entre les personnages, plus que l’univers magique, plairait aux enfants».
C’est ce qui s’appelle avoir eu du nez. Mais l’éditeur avait-il fleuré le succès du livre? «J’adorerais le prétendre, mais non.» D’ailleurs, lorsque J. K. Rowling et Cunningham se rencontrent pour la première fois et qu’elle lui demande, tout de go, «Que pensez-vous des sagas?», alors qu’elle a déjà l’idée des sept tomes de Harry Potter en tête, il lui répond: «Regardons déjà comment va marcher celui-là!» Ce détail le fait rire encore aujourd’hui. «Je lui avais conseillé de garder son travail parce qu’elle ne ferait jamais grande fortune de livres jeunesse. Elle m’a longtemps taquiné là-dessus!»…
Lire la suite : Le Figaro du 12/1/23 pages 34 et 35