Le groupe de presse de l’entrepreneur Albin Serviant – « Têtu », « Ideat », « The Good Life », « Opéra Magazine » – est frappé par la hausse du coût du papier. Ce placement en redressement judiciaire doit lui permettre de poursuivre ses activités tout en discutant avec des investisseurs.
Les temps sont durs pour beaucoup de groupes de presse indépendants, frappés par la hausse du prix du papier et de l’énergie et contraints de rembourser les emprunts, dont les PGE (prêts garantis par l’Etat), souscrits pendant la période du Covid-19. Après la société éditrice de « XXI », en passe d’être reprise par Indigo, le groupe de presse magazine I/O Media, fondé en 2018 lors de la reprise du trimestriel « Têtu » par l’entrepreneur Albin Serviant, a décidé de demander son placement en redressement judiciaire au tribunal de commerce de Paris.
« Je suis en discussion avec plusieurs grands groupes de médias en France depuis l’été pour m’adosser à eux, confie Albin Serviant, le président de I/O Media. Afin de poursuivre ces discussions en toute sérénité, et de préserver les actifs et les talents, j’ai décidé de nous placer sous la protection du tribunal de commerce. » Cette mesure permettra la poursuite de toutes les activités. Reprise ou participation minoritaire, toutes les options sont ouvertes, tant que le fondateur peut garder le contrôle opérationnel.
I/O Media s’est agrandi en reprenant en 2021 « Opéra Magazine », puis en 2022 le bimestriel de design « Ideat », ainsi que le masculin « The Good Life » et le féminin « Dim Dam Dom ». Il compte aujourd’hui une cinquantaine de salariés, pour un chiffre d’affaires en 2023 d’environ 11 millions d’euros (contre 10,5 millions d’euros en 2022, selon I/O Media).
Recherche d’investisseurs
« Têtu » est rentable, avec une marge d’Ebitda d’environ 10 %, et voit même son chiffre d’affaires progresser fortement cette année (+40 %), notamment grâce aux activités de diversification (think tank, événements, formations sur le thème de l’inclusion, activités d’agence…). C’est plus compliqué du côté d’« Ideat » et de « The Good Life », reconnus sur le marché publicitaire, mais dont la diffusion a souffert. « Opera Magazine » et « Dim Dam Dom » tiennent une place moindre dans les revenus du groupe.
Selon l’ACPM, la diffusion payée en France d’« Ideat » a ainsi chuté de presque 25 % en 2022-2023 par rapport à 2021-2022, à environ 35.500 exemplaires. Les fermetures de kiosques, dans la foulée de la crise sanitaire, et l’inflation ont pesé sur les ventes de ces titres haut de gamme (8,50 euros pour « The Good Life », par exemple). Dans le même temps, le prix du papier, qui commence tout juste à baisser, et celui de l’énergie, se sont envolés, mettant l’entreprise dans cette situation inconfortable.
Si le chiffre d’affaires du groupe est à peu près stable, autour de 11 millions d’euros en 2023 (contre 10,5 millions d’euros environ en 2022, selon I/O Media), l’entreprise terminera cette année en pertes. Elle doit aussi faire face aux échéances de ses emprunts et notamment d’un PGE. L’administrateur judiciaire devrait l’aider à renégocier ses échéances.
« En ce moment, le secteur de la presse est difficile pour les indépendants, il faut que je sois soutenu financièrement », conclut Albin Serviant. Le président du groupe en est le premier actionnaire, aux côtés d’autres investisseurs, dont Marc-Olivier Fogiel, Banijay ou encore SOS Participations. D’autres sont donc espérés, pour permettre notamment à Albin Serviant d’appliquer à « Ideat » et « The Good Life » la stratégie de diversification qui a porté ses fruits chez « Têtu ».
Lire : Les Echos du 12 octobre