Mercredi, la proposition de loi de Matthieu Orphelin recommandant la suppression progressive de l’affichage digital et de restreindre les campagnes pour l’automobile et l’aérien sera examinée à l’Assemblée. Son examen donne un coup d’accélérateur à un projet qui menace de fragiliser publicitaires et médias.
La course contre la montre entre les partisans d’une réforme de la publicité destinée à l’adapter aux enjeux climatiques et les professionnels de la publicité et médias, connaît une accélération subite. C’est en effet mercredi que le député écologiste Matthieu Orphelin (EDS) va déposer sa proposition de loi devant la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale.
Destinée à être votée le 8 octobre, sa proposition de loi, dite « Loi Evin Climat », ne reprend plus que 3 des 22 propositions initiales de son texte initial, présenté le 11 juillet et nourri par les 149 propositions de la Convention Citoyenne sur le Climat.
Financement des médias privés
D’ores et déjà, le député écologiste fait face à une levée de boucliers des acteurs du secteur, groupes de communication et médias audiovisuels en tête, qui risquent d’être sévèrement fragilisés par la réforme proposée. La ministre de la Culture et de la Communication, Roselyne Bachelot, a reconnu que cette PPL « pose un véritable problème pour le financement des médias privés ».
Charge explosive
Même amendé et amputé de nombreux points (dont les aliments), la proposition de loi de Matthieu Orphelin conserve en effet toute sa charge explosive. Son article 2 propose l’interdiction progressive, entre 2022 et 2032, de la publicité sur les différents produits et services les plus polluants. Ce qui signifie la restriction, en télévision, en presse et en radio, de toute campagne pour les véhicules à moteur à essence ou diesel, les compagnies aériennes (s’il existe une alternative en TGV) et les produits à fort impact environnemental. Les produits électroménagers les plus énergivores pourraient également être concernés.
Quant à son article 3, il propose l’interdiction et le retrait progressif de l’affichage digital dans l’espace public, alors que ce dernier figure pourtant comme principal levier de croissance du secteur.
Or, selon certaines sources, le projet de loi que défend par ailleurs la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, pourrait reprendre plusieurs – voire la totalité – de ses propositions. Quitte à aller encore plus loin, en particulier sur le terrain des « mauvais » aliments.
A l’arrivée, les sommes qui menacent de s’envoler sont considérables. A eux seuls, les investissements bruts en communication des secteurs automobile, aérien et pétrolier réalisés sont estimés à plus de 5 milliards. La réforme pourrait dépasser de loin l’impact de la loi Evin de 1991 qui ne concernait que la publicité sur l’alcool et les cigarettes.
Lobbying estival
Dès le début de l’été, les acteurs de ce dossier se sont activés. Le 15 juillet, le Syndicat national de la publicité télévisée (SNPTV) a tiré la sonnette d’alarme, dans un courrier envoyé au Premier ministre, Jean Castex. « Frappé violemment en mars par la crise sanitaire et les impacts du confinement, », y est-il écrit. Antoine Ganne, chargé des affaires publiques du SNPTV, ajoute : « Ces mesures, si elles étaient appliquées, entraîneraient une chute des revenus de 20 à 30 % selon le média. Les pertes pour les régies de télévision risqueraient de s’élever à près de 1 milliard d’euros. » Mercedes Erra, présidente de l’Association pour les actions de la Filière Communication, a pointé « l’absence d’études d’impact, le diagnostic mal posé et les dispositions mal adaptées et dangereuses pour l’économie ».
Lire : Les Echos du 29 septembre