À la tête de la rédaction de France Inter, elle pilote des rendez-vous d’information devenus leaders en radio.
LE FIGARO. – Vous êtes arrivée à France Inter il y a un an, en provenance de TF1. Cela a suscité du scepticisme avec l’idée que l’information de TF1 n’est pas compatible avec celle du service public. Est-ce le cas?
Catherine NAYL. – ll y avait aussi l’idée que la télé n’est pas de la radio et que ces deux médias ne pouvaient pas se parler. En fait si! Il y a une culture du service public même en dehors du service public et je l’ai pratiqué dans mon ancien média car TF1 en est historiquement issu. Je n’étais donc pas dépaysée. Toutefois, il y a une identité, une âme propre à Radio France qui n’est pas la même que celle de TF1.
Vous avez imprimé votre marque et la matinale ainsi que les autres rendez-vous de l’info sont leaders. Quel a été votre apport?
Cette matinale était déjà leader ou proche de celle de RTL quand je suis arrivée. Il y avait déjà les bonnes personnes aux bons endroits. Mais je me disais que la singularité de la matinale de France Inter résidait dans la complémentarité de Léa Salamé et Nicolas Demorand. Et à mon sens, nous n’avions pas complètement exploité cela. Ils sont complémentaires dans la façon d’interroger les gens et de voir le monde. Nous avons donc créé le grand entretien sur vingt minutes où nous avons le temps de débattre avec des invités politiques, des intellectuels ou des sociologues. Et cela fonctionne.
Avez-vous ralenti le rythme de l’info sur France Inter pour mettre l’accent sur l’explication?
Le réaménagement de la matinale a donné une meilleure lisibilité. Et nous donnons aussi plus d’explications. Nous avons multiplié les éditions spéciales du «Téléphone sonne» comme celle avec le premier ministre, Édouard Philippe, qui a suscité de très nombreux appels téléphoniques et une grosse activité sur les réseaux sociaux.
France Inter a choisi de ne pas hystériser la crise des «gilets jaunes» en recevant plutôt des experts que des acteurs du mouvement. Êtes-vous en dehors?
Il y a eu grande complémentarité au sein de la grille de France Inter. D’un côté, nous avons des éditions d’information très écoutées le matin, le midi et le soir. Dans ces éditions, nous avons pris le parti de donner la parole à tout le monde. Et nos reporters sont restés très longtemps sur le terrain pour capter la complexité d’un mouvement hétérogène et sans leader identifié. Mais d’un autre côté, il faut aussi prendre du recul. Nous avons des émissions dans lesquelles nos invités prennent le temps d’expliquer et d’analyser la situation. Enfin, la rédaction se pose tous les jours des questions sur le traitement de l’information. Cela n’est pas toujours facile.
Pourquoi aucun leader des «gilets jaunes» n’est venu s’expliquer au micro de la matinale?
Nous avons invité un seul «gilet jaune» dans un entretien. Mais, avant de tendre le micro, il fallait savoir exactement qui ils étaient et d’où ils parlaient. Et parfois ces représentants des «gilets jaunes» ne voulaient pas s’exprimer pour le mouvement mais en leur nom, avec en toile de fond des revendications politiques qui n’étaient pas énoncées clairement. Nous ne sommes pas méfiants envers un mouvement mais nous voulons savoir qui est assis à la place de l’invité. Nous avons donné la parole à tout le monde, mais de manière différente.
Auriez-vous traité ce mouvement de la même façon chez TF1 que chez France Inter?
Chaque média a suivi ce mouvement en approfondissant son propre ADN. Les chaînes d’info ont fait beaucoup d’info, les généralistes TF1 ou France 2 ont suivi en organisant des événements exceptionnels. Même le média social Brut a suivi son ADN. France Inter n’y a pas dérogé. Chaque média a sa spécificité et cela s’est vu…