ENQUÊTE – « On ne peut pas dire qu’ils jouent le jeu de la reprise. » Cet éditeur d’imaginaire n’a rien d’un cas isolé : depuis la réouverture partielle des boutiques Fnac, les maisons assistent à un étrange ballet de livres. Des retours, en masse, des commandes de nouveautés annulées pour les points de vente, et pourtant, un site internet hyperactif.
Dans un premier temps, le secteur de l’imaginaire a cru à une attaque ciblée. « Ils n’ont même pas ouvert nos cartons, tout a été retourné illico », nous indique l’un d’entre eux. Plus gravement, son diffuseur lui assure « qu’aucune nouveauté ne sera prise. Les opérations sont ajournées, au moins jusqu’en septembre ».
L’imaginaire en première ligne
Le couperet tombe sévèrement. « Fnac, l’imaginaire peut difficilement s’en passer. Même si la situation évolue positivement, très positivement, depuis deux ans, les librairies généralistes n’ont pas encore pris le relais pour ce genre », constate une éditrice.
Dans les faits, « à travers la France, les offices sont bloqués pour les établissements. Les prises de notés ont été littéralement effacées. » Comprendre : les ouvrages qui devaient être fournis, parce que commandés, disparaissent. Or, pour certains genres, comme la SF, justement, on estime que Fnac représente 50 % des ventes. On comprend mieux pourquoi la sonnette d’alarme est venue de ce côté.
Plus encore : à cette heure, la majorité des livres ne sera donc pas en magasin. « Pour certains titres, dans l’imaginaire, l’enseigne représente les 3/4 des la mise en place », indique une reponsable dans la diffusion. « 50 % des mises en place de ce genre s’opèrent chez Fnac : c’est une catastrophe pour les maisons. »
Problème : le phénomène est général, toutes les maisons sont concernées. Ou plus spécifiquement, tout ce qui ne relève pas du best-seller est frappé. « Bizarrement, si l’on fait un tour dans les rayons, les Dicker ou Musso n’ont pas subi le même traitement », note un chargé de relation libraire. « C’est inadmissible. Tout retourner, tout annuler sans rien mis en place pour reprendre l’activité, on court à la catastrophe. Dans la trésorerie des maisons, d’ici trois mois, on aura des trous abyssaux. »…