CCFI

Presse : l’éditeur de magazines Prisma expérimente l’IA tous azimuts

Le groupe de presse magazine derrière « Voici » ou « Télé Loisirs » a lancé en parallèle plusieurs projets avec l’intelligence artificielle : rédaction d’articles, voix clonée sur un podcast, chatbot pour répondre aux lecteurs, etc. Prisma est en train de former tous ses journalistes pour être « prêt » à prendre pleinement la vague.

Rédaction automatique de textes, production de podcasts avec une voix clonée… Prisma accélère dans l’intelligence artificielle. L’éditeur de « Capital », « Télé loisirs », etc., est sans doute le groupe de presse magazine qui multiplie le plus les projets dans ce domaine.

Prisma, dans la galaxie Vivendi depuis 2021, croit beaucoup au potentiel futur de l’IA. « Nous sommes très enthousiastes, mais on reste prudent dans la mise en musique », nuance Pascale Socquet, directrice générale de Prisma Média.

Concrètement, Prisma fait plancher depuis une quinzaine de jours ChatGPT sur des contenus « froids » tels que des biographies, ou nécrologies, ou sur des brefs de « Voici ». Toute la rédaction numérique teste l’outil. Environ 10 % du contenu publié est généré grâce à une IA – sous supervision humaine. « Parfois, les rédacteurs gagnent du temps mais pas toujours. C’est pour cela que l’on se donne plusieurs mois avant de dresser un bilan, reprend la dirigeante. Notre objectif est avant tout d’être prêt quand les outils le seront pleinement. » De même, des diaporamas de cuisine sont faits avec ces technologies.

Un podcast avec une voix clonée

Le géant de la presse magazine en France va aussi lancer des tests sur des contenus à faible valeur ajoutée pour « Télé Loisirs » et « Femme actuelle ».

Prisma lance aussi des expérimentations sur le visuel – une couverture de « Ça m’intéresse » de début mai sera générée par IA – et la vidéo/le son. Outre un projet de transcription audio automatique d’articles, un podcast de « Capital » intitulé « 120 secondes » est lancé ces jours-ci. Il synthétisera l’essentiel de l’actualité, au quotidien, et est enregistré avec la voix d’une journaliste de la rédaction qui a été clonée. Et le groupe travaille sur des vidéos sur l’actualité économique avec là aussi, des personnages clonés pour lire les textes des journalistes.

Autre projet : la personnalisation des contenus. Un chatbot est testé depuis quelques semaines sur « Ça m’intéresse » pour dialoguer avec les lecteurs et les inciter à lire tel ou tel article en fonction de leurs centres d’intérêt. « Les premiers résultats sont plutôt prometteurs », indique Maël Montarou, directeur de l’audience digitale.

Inquiétude des salariés

Mais le plus structurant est sans doute la formation de l’ensemble des 400 journalistes d’ici à la fin de l’année. Cela va de quelques heures de sensibilisations à l’IA à plusieurs demi-journées pour maîtriser l’art du prompt. 20 % du budget de formation est consacré à l’IA en 2024.

L’éditeur a finalisé une charte, qui prévoit outre un contrôle humain de toute production générée par IA, mais aussi fixe des limites sur les outils utilisés : par exemple DALL-E (dans l’image) est proscrit, n’ayant pas des garanties suffisantes en matière de droit d’auteur.

Ces expérimentations ont quand même fait du bruit en interne. « On n’est pas contre l’IA mais on veut que ce soit fait en collaboration avec les journalistes. Il faut une information consultation – qui doit s’ouvrir en juin – pour ensuite mandater un expert pour comprendre les apports et conséquences sociales et éthiques », indique Emmanuel Vire, délégué SNJ-CGT. Il s’inquiète notamment que la direction mette en place des déclinaisons des articles des journalistes par des IA, « première pierre à de possibles licenciements, sachant que l’effectif a déjà diminué depuis le rachat par Vivendi ».

Depuis l’irruption fracassante de ChatGPT dans les mains du grand public , plusieurs groupes de presse testent l’IA depuis quelques mois – la traduction par exemple par « Le Monde », la correction par exemple pour « L’Est Républicain », l’aide à la recherche de « fake news » pour Radio France, de courts papiers dans certains médias, etc. – mais pour l’heure, il n’y a pas d’usage massif des robots dans les grandes rédactions. Ce n’est pas tout de suite que R2D2 remplacera le journaliste…

 

Lire : Les Echos du 27 avril

 

Jean-Philippe Behr

Nos partenaires

Demande d’adhésion à la CCFI

Archives

Connexion

Vous n'êtes pas connecté.

Demande d’adhésion à la CCFI