Une exposition passionnante sur l’imprimerie et la typographie intitulée « Quels caractères ! » se tient au Musée Médard, à Lunel, jusqu’au 26 mars 2023. Visite guidée…
Le Musée Médard étant né d’un legs de livres anciens par le collectionneur Louis Médard, ce Musée de France est dédié au livre et au patrimoine écrit. On a pu y voir au fil des ans des expositions consacrées aux dorures, aux bibliophiles, aux ouvrages illustrés ou encore aux livres en pop-up. Le Musée se saisit cette fois d’un élément qui figure à l’origine du livre : la police de caractère, qui donne toute sa vie – et son caractère – au livre imprimé.
Plutôt rondes, à empattements, ou à colonne sans empattements ?
Au rez-de-chaussée, les visiteurs apprennent à distinguer les différentes catégories de polices de caractères. Chaque police est définie par ses axes, ses pleins, ses déliés, ses fûts, ses traverses et ses empattements. Une table de Vox (d’après Maximilien Vox, inventeur de ce système de classification des polices d’écriture) recréée par Arscènes prend pour exemple la lettre P. Elle la décline selon les familles de polices : humanes, geraldes, réales, didones, mécanes, linéales, incises, scriptes, manuaires, fractures et non-latines.
Puis des vitrines donnent des exemples de chacune d’elles figurant dans des magazines, des livres anciens ou sur des jaquettes de DVD. On comprend ainsi pourquoi le service marketing de la marque Bonne Maman utilise une police manuaire pour signifier le fait-maison, et on remarque que la police Comic Sans MS est présente dans les bandes-dessinées et les comics.
Une vidéo éclaire sur les choix de polices suivant le message que l’on veut faire passer. Comme le candidat Obama qui choisit une même police de caractère pour mener toute sa campagne et avoir plus d’impact.
Un petit atelier d’imprimeur
Dans la pièce attenante, un espace reconstituant un petit atelier d’imprimeur met dans l’ambiance. Il est composé d’une presse typographique à platine (ou pédalette) datant de la fin du XIXe ou du début du XXe siècle et d’un meuble de rangement à tiroirs (les casses) pour les caractères typographiques (les lettres). On y découvre les poinçons qui servirent à fabriquer les caractères mobiles inventés par le célèbre Gutenberg au milieu du XVe siècle. Il contribua à démocratiser l’impression de livres en nombre.
Dans une vitrine se trouve le Manuel typographique, utile aux gens de lettres et à ceux qui exercent les différentes parties de l’art de l’imprimerie, écrit par Pierre-Simon Fournier en 1764-1766. Il a été acquis par le Musée Médard spécialement pour cette exposition.
Immersion par les sens dans la bibliothèque d’un collectionneur
A l’étage, le passage par la bibliothèque de Louis Médard est incontournable. Si elle ne fait pas partie de l’exposition temporaire, elle y fait forcément écho.
On passe ensuite avec délectation par le Curieux Cabinet, qui retrace l’histoire de la conception des ouvrages anciens, à commencer par le passage sous presse. Les différentes étapes sont détaillées : choix du format, des papiers et filigranes, de la typographie, gravure, couleur, dorure, reliure, papier marbré…
L’espace sensoriel permet aux visiteurs de toucher différents cuirs et les dorures dont étaient revêtus les ouvrages anciens. En retournant les supports, on apprend que le cuir de mouton (basane) servait aux reliures courantes, le cuir de veau aux reliures de qualité et le cuir de chèvre (maroquin) aux reliures de luxe… On découvre aussi les matrices de lettres imaginaires de l’artiste contemporaine Edith Schmid dont des œuvres sont exposées un peu plus loin.
L’exposition fait également appel à l’odorat. En effet, la parfumeuse gardoise Christèle Jacquemin a recréé les odeurs des livres anciens, de l’encre, de l’or utilisé pour la dorure, du cuir des reliures et de la cire destinée à l’entretenir. Encapsulées dans des boîtes, il suffit aux visiteurs d’ouvrir les couvercles pour se laisser envahir par ces fragrances d’antan et replonger dans l’histoire.
Les lettres de noblesse de l’art contemporain
Enfin, toujours à l’étage, comme pour chaque exposition du Musée Médard, des artistes contemporains ont été invités à créer autour du thème de l’exposition, ici les caractères d’imprimerie. No Luck y montre ses œuvres composées de lettrages au tampon ou à l’acrylique. Jean-Noël Laszlo y présente notamment son œuvre IL FAUT LE FER réalisée en collaboration avec Robert Sanyas, Les voyelles de Rimbaud, et, en avant-première, l’ouvrage Mes mots des autres, coédité avec l’Imprimerie nationale.
Et Edith Schmid, spécialisée dans l’eau forte (gravure à l’acide sur métal), propose des œuvres jouant avec le lettrage et les mots, des lettres parfois imaginaires qui deviennent des motifs à l’esthétique certaine…
Informations pratiques
Musée Médard – 71, place des Martyrs de la Résistance – 34400 Lunel – 04 67 87 83 95
L’exposition Quels Caractères ! est visible du mercredi au vendredi de 14h à 18h et le samedi de 10h à 18h jusqu’au 25 mars 2023. Visite guidée gratuite tous les samedis à 10h30.
Lire : Hérault Tribune du 2 janvier