Plusieurs éditeurs de presse régionale et locale ont partagé à La Presse au Futur leurs stratégies pour faire évoluer leur offre, élargir leur public et diversifier leurs ressources. Retour sur quelques-unes des initiatives qui montrent un secteur qui ne lâche rien sur sa transformation.
Qui mieux que la presse locale et régionale peut répondre aux attentes des Français pour les valeurs du local et de la proximité ? La table ronde « Presse locale et régionale : les nouvelles pistes stratégiques de la presse de proximité », organisée à La Presse au Futur mardi 6 décembre 2022, a été l’occasion de mettre en avant différentes actions de cette famille de presse, qui sait innover sur son territoire et aussi se fédérer, par exemple autour du nouveau supplément télé Diverto, lancé début janvier 2023, ou les différentes initiatives de leur régie nationale 366.
L’enjeu de la « génération liseuse pdf »
« La presse régionale continue d’avoir ce rôle de ciment de la société, de compagnon de route des citoyens. Il faut trouver les moyens d’arriver chez tout le monde et d’intéresser toutes les générations », a souligné Gabriel d’Harcourt, directeur général délégué de La Voix du Nord, groupe qu’il quitte en cette fin de semaine pour devenir dg de La Provence, récemment reprise par l’armateur CMA CGM. La Dépêche du Midi a fait l’expérience de cette nécessaire transition : « L’abonnement papier est toujours un élément clé du système mais la plateforme digitale est en croissance. Les abonnés papiers affichent la moyenne d’âge la plus élevée et ceux du digital la plus jeune. Au milieu, on retrouve la génération des liseuses pdf. Petit à petit, les générations se chassent », a noté son directeur général Jean-Nicolas Baylet. Sur les 800 articles produits chaque jour par ses rédactions, 700 sont repris du print et 100 autres rédigés uniquement pour le digital mais qui génèrent « 80 % de l’audience », grâce à une bonne adéquation entre le contenu et ce qu’attendent les lecteurs et un travail sur le référencement naturel.
Pour Ebra, qui couvre l’ensemble de l’Est de la France, l’année 2022 constitue la « saison 2 » de sa transformation. Le groupe en a profité pour renforcer ses contenus et services avec, entre autres, une société commune avec l’Ecole du ski français pour développer une verticale montagne ou le rachat, en mars 2022, de la société Humanoid, qui édite les médias Frandroid, Numerama et Madmoizelle. L’occasion de s’adresser à une audience plus jeune et d’acquérir des compétences : « Il est important de chercher du chiffre d’affaires sur des logiques d’acquisition plus que sur du reach », a indiqué son président Philippe Carli, qui a d’ailleurs annoncé « de nouveaux investissements dans les mois qui viennent ».
Hacker la croissance de la vidéo
Tous ces groupes producteurs de contenus ont à cœur de se positionner au plus près des usages, en multipliant les synergies entre leurs supports. Le Télégramme veut par exemple rapprocher ses chaînes Tébéo et TébéSud et le journal. « Nos 200 journalistes sont capables de donner à nos télévisions locales une connotation moins magazine et plus news, dans une dimension hot news. Il y a une place à prendre dans une sorte de ‘syndication par le bas’, ce qui ne s’est jamais fait », a assuré Hubert Coudurier, directeur de l’information du Télégramme, qui est devenu un groupe de presse, de services (avec notamment HelloWork, ex-RegionsJob) et d’événementiel. Même souci de développer les synergies éditoriales du côté de La Dépêche du Midi en s’appuyant sur le print, le digital, le communautaire (notamment avec le rugby et Midi Olympique), et sur sa régie transformée en agence de communication, qui vend la vidéo. Il compte sur des renforts issus du collectif : « Digiteka sera une sorte de rotative de la vidéo et offrira une puissance de feu et de couverture pour les annonceurs », a assuré Jean-Nicolas Baylet, faisant référence au partenariat stratégique noué par 366 avec ce spécialiste de la vidéo. « Les audiences se transforment. On veut hacker la croissance en se positionnant sur les contenus audiovisuels : les podcasts, la vidéo, la TV et Diverto, qui sera aussi dans cette logique », a résumé Stéphane Delaporte, dg de 366.
Ebra, qui n’a plus de chaîne locale, fait aussi de l’audiovisuel un axe de développement. Pour disposer d’une télé 100 % digitale, le groupe s’est associé en septembre 2022 à Territoires TV, qui compte désormais six groupes de PQR. Avec la ferme ambition de poursuivre dans cette voie : « Nous voulons investir dans un pôle audiovisuel pour créer aussi du documentaire et de la fiction », a même affirmé Philippe Carli.
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