Pour la première fois depuis quarante ans, les salariés du « New York Times » ont mené une grève de vingt-quatre heures pour obtenir de meilleurs salaires. Le ralentissement économique pèse sur les médias.
« Ne franchissez pas le piquet de grève numérique. » A l’heure où les journaux se lisent plus volontiers sur le téléphone qu’en édition papier, les lecteurs du « New York Times » étaient invités, la semaine dernière, à boycotter leur journal sur tous les supports pendant une journée, à l’appel du syndicat de la presse NewsGuild. Pour la première fois depuis une quarantaine d’années, une grève de 24 heures était soutenue par quelque 1.100 journalistes et personnels du journal, soit plus d’un salarié sur deux du quotidien. Ils protestaient contre l’absence d’un accord social, malgré « vingt mois de négociations » avec la direction.
Leur précédent contrat social, pluriannuel, s’est éteint au printemps 2021, et les deux parties ne s’entendent pas sur le niveau des hausses de salaires collectives pour chaque année du nouveau plan. « Leur proposition salariale ne répond toujours pas à la conjoncture économique, car elle est loin d’être à la hauteur de l’inflation et du taux moyen d’augmentation des salaires aux Etats-Unis », a dénoncé le syndicat. « Sur la durée du contrat, leur offre ne représente qu’une augmentation annuelle de 2,875 % », précise-t-il.
Le syndicat demande aussi un salaire plancher, une meilleure protection sociale et des conditions de télétravail plus souples. « La proposition de la NewsGuild, qui ajouterait plus de 100 millions de dollars de coûts, rendrait difficile le maintien de nos investissements dans le journalisme », a répondu la direction. Les négociations doivent reprendre ce mardi, selon un porte-parole de NewsGuild.
Serrer les coûts
Le « New York Times » fait partie des médias américains les plus florissants, avec un profit opérationnel ajusté qui devrait atteindre 320 à 330 millions de dollars cette année. Le groupe dirigé par Meredith Levien a enregistré 180.000 abonnés supplémentaires au troisième trimestre, pour un total de 9,33 millions d’abonnés (dont 92 % numériques). Un rythme toutefois un peu inférieur à ce qui sera nécessaire pour atteindre l’objectif de 15 millions d’abonnés en 2027. Le chiffre d’affaires du groupe a progressé de 7,6 % sur un an au troisième trimestre, à 547,7 millions de dollars.
Conjugué à l’après-Trump, qui avait dopé la demande d’information pendant plusieurs années, le ralentissement économique pèse plus fortement sur d’autres groupes. Le « Washington Post » a annoncé qu’il cesserait de publier son magazine dominical à la fin de l’année, avec une offre remodelée et rapatriée dans les différentes sections du journal. Et le « New York Times » indiquait cet été que le « WaPo », racheté par Jeff Bezos en 2013, pourrait perdre de l’argent cette année.
Editeur de « USA Today » et de journaux locaux, le groupe Gannett continue aussi à serrer la vis et vient d’annoncer de nouvelles suppressions d’effectifs. CNN est de son côté en plein « recalibrage » stratégique, tandis que la radio publique NPR a dit chercher 10 millions de dollars d’économies.
Lire : Les Echos du 11 décembre